Le Galérien.
Sa vie avait été si simple jusqu'ici. Si simple et si compliquée. Il avait embarqué sur sa première réale, le cur presque joyeux. Ses chaînes qui avaient commencé à enserrer sa vie ne lui avaient jamais vraiment parues lourdes, il se savait condamné par la société, pour ses pensées ses actes. Alors quitte à disparaître, autant que se soit pour son bien, dernière nique à cette morale bien pensante. Sa vie de galérien avait été dure et bonne, il avait découvert que dans cette sorte de mort qu'était son enfermement, il y puisait sa renaissance, sa puissance créatrice. Oh! Bien sur, il paraissait de plus en plus paria. Et alors, cette société qui s'apitoyait sur son triste sort appréciait ses créations. Et son gardien et geôlier, avait compris que plus les chaînes pèseraient plus la puissance créatrice s'exprimerait.
Jusqu'au
jour où le galérien s'aperçut, que le geôlier n'était en fait qu'un pirate,
qu'il avait créé en pure perte. De rage, de désespoir, il sauta par-dessus bord,
n'emportant avec lui que ses chaînes. Rien ni personne ne purent le repêcher,
malgré leurs efforts. Il crut bien y passer mais, les flots ? Poséidon ? Dieu
lui-même ? Lui refusèrent le calme profond libérateur. Il survécut donc, rejeté
sur une île deserte, avec pour seul bien, ses chaînes et les souvenirs qui leur
étaient associées.
L'apprentissage de la vie fut long, par désespoir parfois il se jetait à l'eau
se laissant couler, mais les flots toujours le rejetait. Il finit par se faire
des amis des dauphins qui croisaient au large. Sa seule compagne, mouvante et
régulière était la lune. Celle à qui il parlait, qui le comprenait, ne le jugeait
pas. Inaccessible et si proche. Il finit par s'organiser, créer de nouveau un
peu, création sans vie ni avenir.
Et puis un jour, au loin, un navire passa. Il cria, tempêta, fit tout ce qu'il
pouvait ou se souvenait pour montrer qu'il existait un peu. Il put monter à
bord, n'ayant que ses seules chaînes pour passage. Il demandait peu de chose,
un coin dans une cale, au chaud. Peu lui importait la société brillante de ce
navire. Il avait dépasser ce besoin. Ses seules demandes ? Un hublot pour voir
la lune son amie et confidente, et si possibles de bonnes chaînes pour pouvoir
à nouveau créer. Le capitaine restait dubitatif mais consenti à faire le test.
Une nouvelle vie recommença pour le galérien, la création commençait à revenir
petit à petit. Et puis un soir de tempête, le navire se trouva fissuré. La balafre
suintante serpentait dans la cale du galérien, mort promise et bien réelle.
Quand la brillante compagnie le sut, le fier capitaine ne put l'empêcher de
quitter le navire comme des rats. Mais le galérien refusa de partir, quitte
à sombrer avec le navire à tout moment. Il demanda même des chaînes plus fortes
sentant l'urgence et désirant peut-être désespérément retrouver une dernière
fois son potentiel de création, comme un dernier message à faire parvenir. Après
qu'il sombre corps et bien n'aurait plus d'importance...
On est sans nouvelles du navire et de ses deux derniers passagers pour le moment...
©JC
(Copyright ExtrêmeSM)
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